Gervais Pellissier nous a fait part de son expérience du management au sein du Comité de Direction du Groupe France Télécom Orange, et de la prise en compte des parties prenantes (actionnaires, clients, collaborateurs).
Jacques Birol a apporté le regard de Baltasar Gracian, ce jésuite du XVIIe siècle pour concilier ambition et prudence dans le management des organisations.
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A la croisée des chemins, une entreprise concentre les intérêts parfois divergents des actionnaires, des clients et des collaborateurs. France Telecom / Orange n’échappe pas à ce mélange des genres – bien au contraire – puisqu’elle défend même l’intérêt de l’état Français et de fonctionnaires en sus de ses collaborateurs. Ainsi comme nous le fait remarquer Jacques Birol, Orange constitue un sujet d’étude idéal, à la fois riche et concret, pour expérimenter les maximes de Balthasar Gracian sur l’art d’entreprendre et d’innover. Gervais Pellissier qui partage avec nous son expérience de la direction générale du groupe Orange France Télécom nous explique qu’une singularité importante d’Orange est que sa transformation économique, conséquence notamment de l’arrivée de la concurrence, a précédé sa transformation culturelle : le changement de statut est survenu avant le changement dans les esprits. Par la suite il nous expose les difficultés auxquelles il a dû faire face lors de la crise sociale que l’entreprise a traversée et les solutions mises en œuvre pour circonscrire sinon résoudre le problème à sa racine via une transformation globale et profonde de son mode de management. Nos deux interlocuteurs nous invitent à repenser les modèles de management modernes qui font la part belle aux KPI et tendent parfois à aliéner les collaborateurs en les transformant en « KPI people ». La multiplication des indicateurs de suivi dans les organisations ne doit pas occulter le fait qu’il est difficile d’apprécier une performance avec une série de valeurs numériques et que par ailleurs un tel pilotage conduit souvent à des situations absurdes où par exemple une même activité est suivie par une quarantaine d’indicateurs différents. Les collaborateurs se trouvent alors dans une situation floue et inconfortable, ne sachant pas lequel des objectifs sous-jacents et parfois contradictoires ils doivent poursuivre. L’essor des Technologies de l’Information et de la Communication – TIC, véritable révolution de notre époque, doit être maitrisé pour éviter certains écueils et notamment celui de la démesure dans la mesure. Par ailleurs, malgré le rôle grandissant des nouvelles technologies dans les entreprises et dans notre société, celles-ci ne pourront jamais remplacer le contact humain. Les manageurs doivent l’avoir en tête et conserver un lien fort avec leurs équipes et le terrain.
L’arrivée du 4ième opérateur mobile Free a été un véritable bouleversement dans le marché des Telecoms. L’innovation qui était présentée par Schumpeter comme « destruction créatrice » doit se poursuivre malgré l’intrus, qui s’il a fortement contribué à réduire les tarifs grand public handicape certainement la capacité globale du marché à investir. Gervais Pellissier démontre à quel point cet équilibre de marché peut être subtil et évoque avec nous les prochains défis auxquels Orange se trouve confronté…
On retiendra de l’intervention de Gervais Pellissier et de Jacques Birol plusieurs enseignements forts : le mirage que constitue le management par les KPI seuls ; le danger du suremploi de technologies de l’information et de la communication au détriment d’un management de proximité ; et enfin l’importance de se renouveler et de s’adapter dans un environnement changeant.