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comment utiliser le potentiel de la data pour développer des services de mobilité innovants ?

By 8 février 2017avril 5th, 2024publications

L’explosion des données est au cœur de l’émergence des nouveaux services de mobilité. Mais, quelles sont finalement les conditions permettant l’émergence de services de mobilité innovants ? Comment mettre en place un écosystème propice à l’émergence de ces services ? Et quelle est la place des acteurs publics dans cet écosystème ? La solution semble simple – il faut associer tous les acteurs qui possèdent les données et les compétences nécessaires – mais sa mise en œuvre n’est pas évidente …

LA DATA PROVOQUE DES RUPTURES DANS LES SERVICES DE MOBILITE

Open data, big data, data mining, data scientist, data viz., plateformes de données, sont autant de buzzwords que l’on trouve dans les transports comme dans les autres secteurs.

Mais, dans les transports, la data prend une importance toute particulière car de plus en plus de données sont produites et utilisées par de plus en plus d’acteurs (acteurs publics, opérateurs de transport, constructeurs automobiles, capteurs, crowdsourcing et applications mobiles, etc.). Cette production massive de données a pour conséquence de complètement désiloter les écosystèmes traditionnels et, provoque de véritables ruptures dans les services de mobilité.

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PARTIR DES SERVICES PLUTÔT QUE PARTIR DES DONNEES ?

Il est incontournable pour les acteurs des transports d’investir dans la collecte de données et la constitution de plateformes de données. Cependant, la collecte de la donnée ne doit pas être un objectif en soi. De nombreux acteurs oublient qu’il s’agit avant tout de se servir de la donnée comme d’un « carburant » pour le développement de services s’appuyant sur l’exploitation de ces données.

Ainsi, il est préférable de partir des services, ou des types de services que l’on souhaite faire émerger, pour ensuite préciser le bon périmètre de données à utiliser. Et, il est plus aisé de trouver des modèles économiques robustes en s’appuyant sur des services plutôt qu’en s’appuyant sur les seules données pour lesquelles le consentement à payer peut être faible, a fortiori quand il s’agit de données facilement accessible par ailleurs (web scraping).

De fait, la tentation des acteurs publics de mettre à disposition des tiers des méga entrepôts de données pour que ces derniers développent des services de mobilité à forte valeur ajoutée est louable. Mais, des freins empêchent encore trop souvent le développement de services pérennes.

  • Les données sont partielles, notamment les données provenant de l’open data, et il manque souvent des informations clés (temps réel),
  • Les données sont fournies avec des formats hétérogènes, ce qui crée des barrières à l’entrée et limite la scalabilité des services, en particulier pour les petits acteurs et les start-ups.

Les partisans de l’open data indiqueront que de nombreuses données restent encore à rendre disponibles et, qu’il faut poursuivre l’ouverture des données et les réflexions sur la normalisation des données pour mettre en place les conditions nécessaires à l’émergence de services pérennes.

D’autres argumenteront que les données qui ont le plus de valeur ont finalement peu de chances d’être un jour disponibles sur les plateformes publiques, en particulier les données commercialement sensibles (temps réel, régularité et qualité de service, disponibilité des services et de l’infrastructure, etc.), ou encore, les données produites directement ou indirectement par les particuliers (les enjeux importants d’anonymisation et de respect de la vie privée limitant légitimement le partage et la réutilisation de ces données).

Vaste débat qui a déjà fait l’objet de nombreuses publications et de plusieurs réglementations et, qui est loin d’être clos. Mais, en prenant l’exemple des services d’information voyageur, nous constatons de manière pragmatique qu’à l’heure actuelle les services les plus plébiscités (Google / Waze, Citymapper, etc.) ne sont pas nés grâce à l’open data. Et les services de mobilité de demain se développent actuellement plutôt dans des écosystèmes fermés, dans une logique d’open innovation. Les différents acteurs y apportent leurs données, mais surtout, leurs connaissances métiers et les briques technologiques indispensables pour créer des services en rupture et des positionnements concurrentiels différenciants : Uber / Volvo / Ford (voiture autonome), Keolis / Navya (bus autonome), Gemalto / Orange / RATP / SNCF (Wizway Solutions, JV dédiée au développement de la mobilité sans contact).

QUELLE PLACE DES ACTEURS PUBLICS POUR FAIRE EMERGER DES SERVICES DE MOBILITE INNOVANTS ?

De nombreux acteurs publics s’interrogent sur les actions à engager afin de faire émerger sur leur territoire des services de mobilité innovants qui possèdent un modèle économique pérenne et contribuent à l’objectif d’intérêt général.

Apporter une réponse générale à cette question s’avère évidemment complexe. De manière schématique, deux grandes options de positionnement s’offrent en effet aux acteurs publics :

  • S’investir dans la mise à disposition des données, et le cas échéant se positionner en agrégateur des données de mobilité, pour que des tiers se chargent sur cette base de développer des services à forte valeur ajoutée (par exemple, services d’information voyageur temps réel et prédictive, information précises et temps réels sur les travaux, événements, incidents et congestion, etc.) ;
  • Se positionner en développeur de services. Pour développer ces services, les acteurs publics s’appuient alors sur leur socle de données, complété par des données provenant d’acteurs privés, à l’instar du Grand Lyon et du programme Optimod / Opticities.

Chaque positionnement possède son lot d’avantages et d’inconvénients. Le positionnement d’agrégateur de données limite les investissements et l’implication des acteurs publics. Il nécessite néanmoins une capacité à animer un écosystème favorisant le développement des services (communication sur les données disponibles, accompagnement des développeurs de services). Les données doivent également être mises à disposition sous un format et des modalités facilitant leur réutilisation (API, web services).

Le positionnement de développeur de services favorise l’émergence de services conformes aux objectifs de la Puissance Publique puisque ceux-ci sont directement développés sous le pilotage des acteurs publics. Cependant, il peut nécessiter une implication importante (à la fois financière et en termes de ressources humaines et compétences). Par ailleurs, les acteurs publics peuvent se retrouver en « situation de concurrence » avec des services développés par des acteurs privés : information voyageur (remontée par des applications de crowdsourcing), GPS, etc.

Finalement, le choix du meilleur positionnement pour faire émerger des services innovants repose principalement sur l’ambition politique et les moyens des acteurs publics. Et, quelle que soit l’option de positionnement choisie, l’implication des acteurs privés dans le développement des services est incontournable car ceux-ci disposent de données et de savoir-faire clés pour créer des services agiles et performants : big data, capacité de développement d’algorithmes puissants, compétences en design et ergonomie des applications, capacité à faire des évolutions rapides en cycle court, etc.

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Lionel Chapelet

LChapelet

[Sources]
Analyses PMP – Photo libre de droit (Pixabay)